Monday, January 30, 2006

la descente du Maroni

,Le Maroni est le plus long fleuve de Guyane (520 Kms ), faire la remontée du fleuve en pirogue prend cinq jours environ et exige beaucoup d'expérience de la part des piroguiers car les sauts en période de pluie ne sont pas faciles à passer. Nous sommes en saison sèche, harnachés de nos gilets de sauvetage, le fleuve est immense,et peut atteindre 5 kms de large à certains endroits: on ne voit que la berge la plus proche. La pirogue très rustique transporte une douzaine de passagers et fonctionne au moteur. Il est prévu de faire halte dans les villages amérindiens que nous rencontrerons. Le Maroni n'est pas une destination touristique très courue c'est la nature à l'état brut et c'est là tout le charme. Les villages sont peuplés de 30 à 70 habitants qui vivent de la culture du manioc, de la canne à sucre, de la récolte des fruits: ananas, banane, noix de coco, de la pêche... A ce propos, les orpailleurs clandestins font un tort considérable à la population en rejetant dans le fleuve le mercure. La consommation de poissons comporte des risques que l'on n'est pas encore en mesure d'apprécier mais qui sont certains.
A Apatou,nous nous arrêtons pour déjeuner, au menu, du poisson cuisiné selon la coutume locale. Après le repas, sous une chaleur accablante, nous faisons un tour de village au cours de laquelle nous avons l'occasion de parler avec un groupe d'adolescents emerveillés devant nos appareils photos numériques. Nous faisons une halte au carbet municipal: c'est un abri en dur qu'un jeune garçon est en train de balayer, les gens de passage peuvent y installer leur hamac pour la nuit.
Le passage du saut Hermina, en aval d'Apatou bien qu'assez impressionnant et necessitant de la part du piroguier une technique sans failles, nous avait laissé sur notre faim d'aventures la période sèche limitant le côté spectaculaire de la manoeuvre. C'est au retour, que nous avons eu droit au frisson qui nous manquait d'avoir vécu pour que le souvenir reste gravé dans notre mémoire de touristes audacieux. A mi-chemin du retour, alors que nous naviguions loin des berges au beau milieu du fleuve, laissant aller nos pensées, bercés par le ronron du moteur et le reflet de l'eau boueuse mais cependant moirée en surface, un orage a éclaté le temps extirper nos K-way du sac à dos nous étions déjà trempés jusqu'à la moelle et la force de la pluie était telle que nous n'avions d'autres ressource pour faire front que de rentrer la tête dans nos genoux. Au bout d'un moment, je trouvai la force de me retourner pour vérifier que le piroguier était maître de la situation, il l'était en effet bravant courageusement la tempête mais la pirogue avec la douzaine de passagers recroquevillés dans les gilets de sauvetage orange qui se découpaient sur le gris de l'eau agitée de violents remous avait un air de famille avec le "radeau de la méduse".La lutte avec les éléments déchainés a duré un bon moment. Le temps de voir le fond de la pirogue se remplir d'eau, de ressentir des courbatures à force de plier la tête, et de se poser mille questions sur la distance qu'il nous restait à parcourir avant d'atteindre l'embarcadère. Enfin, nous avons aperçu la berge avec soulagement et une déchirure dans le ciel comme si brutalement nous étions passés de l'automne au printemps, et un arc-en ciel comme un signe divin s'est jeté comme un pont entre le fleuve et les nuages qui disparaissaient.
Quand nous avons mis pied à terre, les cheveux collés au visage, dégoulinants , nous n'étions plus frustrés du grand frisson simplement pressés de nous sécher.

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