Thursday, February 01, 2007

Noir comme un arc en ciel

Dans "l"enterrement à Ornan", Courbet se sert du noir comme d'une couleur... Laurence des Cars qui est conservatrice du Patrimoine au Musée d'Orsay et chargée de cours à l'Ecole du Louvre agrémentait son commentaire de cette réflexion particulièrement intéressante; le trou béant de la fosse au premier plan du tableau est une énigme, l'autre versant de "l'origine du Monde" plus scandaleux celui-là mais on comprend que vie et mort comme noir et couleur sont indissociables. J'ai revu, il y a quelques semaines ces 2 chefs d'oeuvre de la peinture du 19ème siècle et une fois de plus j'ai constaté à quel point relire un livre ou revoir un tableau ou un film nous mettait face à nos préoccupations du moment. Hier soir, assez tard j'étais encore plantée devant l'écran TV attendant que mes paupières s'alourdissent et lasse d'assister à des débats stériles sur les"frasques" de la chirurgie esthétique quand après avoir zappé je suis tombée en arrêt devant un film qui me donnait une vague impression de "déjà vu". Je me demandais si ce n'était pas "Happy together" de Won Kar Waï... Le virage de la couleur dans une sorte de noir lumineux avec quelques touches de rouge ou de vert m'intriguait au plus haut point et me tenait en éveil autant que le scénario qui par ailleurs captait aussi très fort mon attentio. Une ambiance entre Jim Jarmush et Gus Van Sant, le premier pour le côté road movie lent et dépouillé, le second pour le côté dérangeant de la situation et la gestuelle des acteurs réglée comme une chorégraphie. De plus en plus intriguée , j'avais dû louper un bon quart du film. Je suis donc allée à la peche sur internet, à la recherche du titre de cet OVNI cinématographique et j'ai trouvé! Le film de Kasushi Watanabe a pour titre 19 ( nineteen ). Un jeune étudiant est enlevé par " jeunes malfrats qui prennent un malin plaisir à lui faire subir des sévices psychologique et physiques au cours d'une balade hasardeuse en voitures ( au pluriel, car il yen a plusieurs!) Malgré ou à cause des humilations qu'il subit il ne peut s'éloigner de ses bourreaux et finit même par ne plus pouvoir les quitter. On appelle cette réaction ambiguë, le syndrome de Stockholm.
Dance film comme dans le tableau de Courbet, le noir est une couleur lavie et la mort, l'amour et la haine sont en surimpression jusqu'à la perte de nos repères. Le cinéma est aussi fait pour ça: déranger l'ordre établi.

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